Jour 73 – 22° jour d’un chemin avec Marie

Demandons l’esprit de crainte et de piété

« Vous qui craignez le Seigneur, louez-le, toute la race de Jacob, glorifiez-le, redoutez-le, toute la race d’Israël. » (Psaume 22,24)

La réticence actuelle à parler de la crainte de Dieu est sans doute justifiée, tant le langage de la peur a pu rendre méconnaissable le fait que Dieu est amour. Pour éviter ce danger, on se sert, partout où c’est possible, d’un autre vocabulaire. Mais il reste, dans les deux Testaments, des passages où la crainte de Dieu est le mot clef difficilement remplaçable.

1. Signe de croix

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen.

2. Silence

(Acceptons ce terme de crainte que la Bible n’a pas ôté de son vocabulaire. Essayons de nous mettre, par rapport à ce terme, dans cette attitude que St Ignace nomme « l’indifférence ». Autrement dit : je fais taire le ressenti que ce terme fait surgir en moi pour me rendre disponible à ce que la Parole essaye de me dire. Je prends un temps de silence.) 

3. Psaume

.

.

Psaume 18

La loi du Seigneur est parfaite, qui redonne vie; la charte du Seigneur est sûre, qui rend sages les simples.
Les préceptes du Seigneur sont droits, ils réjouissent le cœur; le commandement du Seigneur est limpide, il clarifie le regard.
La crainte qu’il inspire est pure, elle est là pour toujours; les décisions du Seigneur sont justes et vraiment équitables :
plus désirables que l’or, qu’une masse d’or fin, plus savoureuses que le miel qui coule des rayons.
Aussi ton serviteur en est illuminé; à les garder, il trouve son profit.

Commentaire

Dans ce contexte, la crainte de Dieu est une réalité durable et non pas passagère. « La crainte du Seigneur est pure, immuable à jamais. » L’explication de cette crainte immuable n’est pas à chercher dans l’émotion religieuse, mais dans le langage politique de l’époque. Les traités de protection stipulaient que les protégés craindraient et serviraient fidèlement leur protecteur. Dans l’alliance de Dieu avec Israël, les mêmes mots expriment l’engagement de fidélité envers Dieu : « Que te demande le Seigneur ton Dieu, sinon de craindre le Seigneur ton Dieu, de suivre toutes ses voies, de l’aimer, de servir le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur et de toute ton âme ? » (Deutéronome 10,12) Craindre, aimer et servir Dieu sont ici synonymes. La crainte de Dieu n’est plus une émotion mais une attitude stable de fidélité à l’alliance.

Dans les psaumes, craindre le Seigneur, c’est « garder son alliance et se souvenir d’accomplir ses volontés. » (Psaume 103,18) « Ceux qui craignent le Seigneur » forment « la grande assemblée » des fidèles réunis au Temple pour prier et adorer (Psaume 22,26). Dans ce contexte, la crainte du Seigneur correspond à peu près à ce que nous appelons la pratique religieuse. C’est pourquoi elle s’enseigne : « Venez, fils, écoutez-moi, la crainte du Seigneur, je vous l’enseigne. » (Psaume 34,12) « Enseigner la crainte du Seigneur », ce n’est pas du tout susciter la peur, mais c’est enseigner les prières et les commandements, initier à une vie de confiance en Dieu. « Vous qui craignez le Seigneur, ayez confiance en lui. » (Ecclésiastique 2,8) Tenant compte de l’usage que la Bible fait du mot craindre, on peut, à bien des endroits, le traduire par adorer ou aimer, et traduire la crainte de Dieu par la fidélité.

Cette crainte du Seigneur est un don de l’Esprit Saint : dans sa première lettre aux Corinthiens au chapitre 12 verset 3, Saint Paul écrit : « Et personne n’est capable de dire :  » Jésus est Seigneur  » sinon dans l’Esprit Saint ». Si, sans l’inspiration de l’Esprit, nous ne pouvons pas reconnaître en Jésus le Seigneur, comment, sans l’Esprit Saint, pourrions-nous l’adorer et le servir? Au service, la crainte apporte le respect, le sens de son altérité. Seule la gratuité de son amour nous autorise à le servir.

Ainsi, nous lisons au psaume 122 : « 01 Vers toi j’ai les yeux levés, vers toi qui es au ciel. 02 Comme les yeux de l’esclave vers la main de son maître, comme les yeux de la servante vers la main de sa maîtresse, nos yeux, levés vers le Seigneur notre Dieu, attendent sa pitié. »

Comment dire, à la fois, le Très-Haut ET le Très-Bas, le Tout-Puissant ET le Tout-Aimant, le Tout-Autre ET le Frère ? Comment éviter « le Dieu-patron » sans tomber dans « le Dieu copain » ? Peut-être que ce langage de « crainte » essaye de marcher sur une ligne de crête, comme les parents qui cherchent une ligne de crête entre l’autoritarisme et le laisser-faire !

4. Évangile

Évangile selon saint Matthieu (18, 1-5)

À ce moment-là, les disciples s’approchèrent de Jésus et lui dirent : « Qui donc est le plus grand dans le royaume des Cieux ? »
Alors Jésus appela un petit enfant; il le plaça au milieu d’eux et il déclara : « Amen, je vous le dis : si vous ne changez pas pour devenir comme les enfants, vous n’entrerez pas dans le royaume des Cieux. Mais celui qui se fera petit comme cet enfant, celui-là est le plus grand dans le royaume des Cieux. Et celui qui accueille un enfant comme celui-ci en mon nom, c’est moi qu’il accueille.

Commentaire

Normalement, les parents ne conduisent pas leurs enfants à avoir peur d’eux … mais il n’en reste pas moins qu’ils sont parents... comme Notre Père.

Notre Père

Notre Père, qui es aux cieux,
que ton nom soit sanctifié,
que ton règne vienne,
que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel.
Donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour.
Pardonne-nous nos offenses,
comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés.
Et ne nous laisse pas entrer en tentation
mais délivre-nous du Mal.

Amen.

.

.

Dans le livre d’Isaïe, la crainte de Dieu est un charisme du Messie : « Sur lui reposera l’Esprit du Seigneur : esprit de sagesse et d’intelligence, esprit de conseil et de force, esprit de connaissance et de crainte du Seigneur. » (Isaïe 11,2) Tout autant que la sagesse et la force, la crainte du Seigneur est un don de l’Esprit saint ! Ce même don s’appelle aussi humilité. Craindre le Seigneur, c’est reconnaître en lui la source de tout bien. Cette transparence était au cœur de la vie de Jésus : « Je ne fais rien de moi-même … mais le Père demeurant en moi fait ses œuvres. » (Jean 8,28 et 14,10)

N’oublions pas, dans la Bible toutes ces invitations à ne pas craindre.  L’homme biblique connaît la peur, comme les autres, devant un déploiement de forces hostiles, devant les pièges de la nuit, devant l’inconnu ou les menaces du mal quel qu’il soit. Dans ses frayeurs la voix du Seigneur le rassure. C’est le cas d’Abraham qui a dû livrer bataille pour libérer Loth, son neveu, pris en otage par des ennemis : « Ne crains pas, c’est moi ton bouclier » (Gn 15,1). Isaac est réconforté de la même manière dans le conflit qui l’oppose aux Philistins à propos de puits d’eaux vives : « Je suis le Dieu d’Abraham, ton père, ne crains pas car je suis avec toi » (Gn 26,24). 

Voilà un autre aspect de la crainte de Dieu : selon le prophète Isaïe, la crainte de Dieu guérit des craintes des hommes. 

Oui, ainsi m’a parlé le Seigneur lorsque sa main m’a saisi et qu’il m’a appris à ne pas suivre le chemin de ce peuple. Il m’a dit : « Vous n’appellerez pas complot tout ce que ce peuple appelle complot, vous ne partagerez pas ses craintes et vous n’en serez pas terrifiés. C’est le Seigneur que vous proclamerez saint, c’est lui qui sera l’objet de votre crainte et de votre terreur. » (8,11-13) 

De toute évidence, Isaïe appelle au courage et à la confiance, mais cette confiance, il l’appelle crainte et terreur ! C’est une expression rhétorique, mais plus que cela. Isaïe sait que la peur est incontrôlable. Alors c’est comme s’il disait : « Vous ne pouvez pas ne pas craindre : alors craignez Dieu ! Dirigez donc vers Dieu toute cette énergie qui anime votre peur. » Cette crainte de Dieu qui absorbe les autres craintes n’est pas facile à définir, mais elle est certainement la source d’une grande liberté intérieure. Celui qui a l’appui du Seigneur, le Dieu fort et puissant par excellence, n’a à craindre de personne d’autre.

.

.

5. L’Esprit de piété

Ainsi la crainte de Dieu dans laquelle nous conduit l’Esprit Saint peut-elle se traduire dans ce dernier don de l’Esprit qu’est la piété. Encore un mot vieillot et passé de mode. Les mots vieillissent quand nous changeons d’époque et de culture; dommage que, souvent, on perde en même temps, les réalités que ces mots voulaient désigner.

Ce que « piété » voulait désigner, c’est peut-être ce sentiment éprouvé lorsque, devenus adultes et indépendants sur le chemin de nos vies, nous regardons celui qui nous a engendré physiquement et quotidiennement et que ce regard nous fait entrer dans le mystère de la paternité (Ce pourrait aussi être vrai de la maternité). Alors, ce qui naîtrait en nous pourrait toucher à « la piété ».

Laissons-nous guider par le Pape François : « Dans sa lettre aux Romains, saint Paul écrit au chapitre 8 versets 14 et 15 : « En effet, tous ceux qui se laissent conduire par l’Esprit de Dieu, ceux-là sont fils de Dieu. Vous n’avez pas reçu un esprit qui fait de vous des esclaves et vous ramène à la peur ! Mais vous avez reçu un Esprit qui fait de vous des fils ! Et c’est en Lui que nous crions : « Abba ! », c’est-à-dire « Père » ! »

C’est pourquoi le don de piété suscite tout d’abord en nous la gratitude et la louange. La piété est donc synonyme d’un authentique esprit religieux, d’une proximité filiale avec Dieu, de cette capacité à le prier avec amour et simplicité qui est propre aux personnes humbles de cœur. 

Si le don de piété nous fait croître dans la relation et la communion avec Dieu et nous conduit à vivre comme ses enfants, il nous aide, dans le même temps, à déverser cet Amour aussi sur les autres et à les reconnaître comme des frères … Certains pensent que faire preuve de piété signifie fermer les yeux, prendre le visage d’une image pieuse, faire semblant d’être comme un saint. Cela n’est pas le don de piété. Le don de piété signifie : être capable de se réjouir avec qui est dans la joie, de pleurer avec qui pleure, d’être proche de qui est seul ou angoissé, de corriger qui est dans l’erreur, de consoler qui est affligé, d’accueillir et de secourir qui est dans le besoin.

6. Prions

Demandons à Dieu que les dons de son Esprit puisse vaincre nos craintes, nos incertitudes, également notre esprit inquiet, impatient, et qu’il puisse faire de nous des témoins joyeux de Dieu et de son Amour, en adorant le Seigneur en vérité et également au service de notre prochain avec douceur et avec le sourire que le Saint Esprit nous donne toujours dans la joie. Que le Saint Esprit nous donne à tous ces dons de crainte et de piété. Amen

Et que Marie nous enseigne à vivre en fils et fille du Père.

.

.

Le lundi de Pentecôte, 1° juin, nous fêterons « Marie, mère de l’Église ». Une eucharistie sera célébrée à 10 h 30 dans la basilique d’Avioth.

(Les places seront limitées à ce que nous autorisent les normes de distanciation sociale)

À demain !

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *